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jeudi 28 mars 2024

La guerre autour du golfe du Lion ou de Lyon

Golfe du Lion ou de Lyon?
Au 18ème siècle d’éminents historiens et géographes se sont allègrement étripés autour du « Golfe du Lion » et « Golfe de Lyon ». Le fameux lion serait-il celui du Pic Saint Loup ou celui d’Hannibal?

Surtout n’allez pas demander l’avis de l’ unité de Geosciences de Montpellier , elle n’en sait rien et l’indique dans ce court texte publié le 25 juillet 2015 « A propos d’étymologie, il est fréquent que le temps ait effacé toute trace de certitude. Nous sommes alors réduit à balancer sans fin entre les différentes hypothèses et légendes. Mais quand on invoque des légendes, c’est toujours la plus jolie qui est véridique. »
Et selon la plus jolie légende version unité de Géosciences  » A l’époque ancienne et troublée du haut Moyen-Age, les navigateurs méditerranéens n’avaient pas encore maîtrisé l’utilisation du GPS et se déplaçaient en visant des points de repère disséminés le long de la côte et visibles depuis le large. Les caboteurs désirant rallier Maguelone repéraient la montagne en forme de sphinx, qui comme chacun sait, est un lion couché relevant fièrement sa tête d’homme. Mais pour les matelots moins lettrés que leur commandant, c’était bel et bien un lion qui se tenait au fond du Golfe, et ils avaient bien raison d’identifier ainsi notre majestueux Pic St Loup ! Et c’est ainsi que la vaste baie sableuse située entre Camargue et Roussillon est devenue le Golfe du Lion ».


Diantre! entre lion et loup, la jolie légende vire à la fable de La Fontaine. Car si vous avez déjà vu le Pic Saint Loup, pour y déceler de loin une tête de lion c’est que les marins de l’époque devaient fumer de la corde d’amarrage ou de l’algue séchée.
Une autre légende remonterait à Hannibal, oui, Hannibal qui aurait terrassé un lion vers les Saintes Maries de la Mer On peut toutefois relever que le thème léonin a inspiré la Camargue, avec l’ étang du Lion près des Saintes Maries, dont l’église et le bord de mer s’ornaient autrefois de lions en marbre tournés vers le golfe. Le symbole du lion se retrouvait également sur les monnaies anciennes de Marseille.

Le lion et le golfe tournent au véritable cirque au 18ème siècle

Allez savoir pourquoi, d’un seul coup en 1725 le sieur Fillol professeur d’hydrographie publie une grande carte du… « Golfe de Lyon ».
La mode était lancée, qui devait sans doute flatter la bonne ville de Lyon. Cela suscita surtout une polémique entre géographes, cartographes et savants de tout poil. Le nom golfe de Lyon sera employé jusqu’en 1876, un ingénieur des Ponts et Chaussées, Charles Lentheric publie un ouvrage « les villes mortes du Golfe de Lyon » . Toutefois à l’intérieur de l’ouvrage, l’auteur fait part de ses doutes sur cette appellation « Lyon étant trop loin et on ne retrouve pas ce nom dans les écrits anciens ». Lentheric émet l’hypothèse qu’en fait le golfe portait plutôt un nom dérivé du terme « ligure », la mer des ligures se serait transformée en lion. Une hypothèse de plus!


En 1830, le cévenole et médecin du roi Louis XV , Jean Astruc , auteur d’ouvrages sur le Languedoc s’insurge et met en garde « de ne point adopter l’opinion frivole du vulgaire qui a donné à ce golfe le nom de la ville de Lyon qui se trouve à cent lieues ! »
Du temps de Saint Louis, le lion domine
Jean Astruc, tout comme Conrad Malte Brun géographe  ou la revue de la société des études historiques de 1834 s’appuient  sur les écrits de Guillaume de Nangis, confesseur du Roi Saint Louis qu’il accompagne en croisade. Dans sa chronique, à l’aube du troisième jour de navigation, de Nangis écrit en latin qu’ils essuient une tempête sur la « mare Leonis » (Mare leonis ideo fic nuncupatur quod eft femper…)

Après Saint Louis, sur les cartes,  on retrouvera ce nom sous forme de « sinus leonis » (sinus:golfe, leonis lion).  Point de « Sinus Lugdunensis » (golfe de Lyon)  nulle part constatent les partisans du Lion. Jean Baptiste Bourguignon d’Anville, dont les cartes furent utilisées par ce grand voyageur que fut Bougainville, liait le Lion aux tempêtes « les marins de Marseille à la Catalogne disent que les tempêtes les plus terribles sont dans le golfe du Lion, d’où ce nom ».

Il est intéressant de noter que l’abbé Guyot, l’historien connu pour ses querelles avec Voltaire, souligne dans ses écrits cette polémique entre les partisans du Golfe du Lion et ceux du Golfe de Lyon. L’abbé soupçonne les Jésuites de la société savante des Bollandistes, d’avoir à tort soutenu « le Golfe de Lyon » car cela sonnait plus français. On se demande bien pourquoi…
Pour Guyot le nom « Golfe du Lion » ne remonterait qu’au XIV siecle . Il cite les anciens Pline, Ptolémée , Mela, ou Strabon qui désignaient cette partie de la mer Méditerranée en « mare gallicum », la mer des Gaulois. L’abbé Guyot penche aussi pour la thèse mare Leonis, celle des bateaux de Saint Louis, de la mer déchaînée, des tempêtes rugissantes comme des lions. Il souligne d’ailleurs que les cartographes sérieux et documentés prennent le soin d’écrire sous le titre Golfe du Lion « Sinus Leonis » .
A partir des années 1900, le terme golfe de Lyon a disparu des cartes et ouvrages. Le Lion avait triomphé.

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