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jeudi 21 novembre 2024

La saga du requin blanc de Sète

Plus grand requin blanc naturalisé au monde et exposé depuis 62 ans au musée zoologique de Lausanne, l’énorme squale, de près de 6 mètres, a été pêché en 1956 au large de Sète. Retour sur une véritable épopée.

Le 13 octobre 1956, une aube grise et froide autour du « Rosina Raphaël », un petit chalutier qui navigue à 4 km des côtes, trainant son filet de cent mètres de long, entre Maguelone et Sète. Les quatre matelots à bord et leur capitaine Antoine Ferrigno accomplissent là leur travail quotidien, attraper le plus possible de poissons et du gros et pourquoi pas un énorme thon qui finira à la criée de Sète.
A bord chacun est persuadé d’avoir fait la prise de sa vie lorsque une « chose » énorme se débat dans le filet de 120 mètres. Du lourd. Du très lourd.

 DEUX DAUPHINS DANS LE VENTRE ET UN FOIE DE 360 KGS

Le filet semble comme vissé aux fonds. S’ensuit un long combat, les hommes à la manœuvre pour hisser, mètre par mètre ce qui semble être un mastodonte. La forme émerge enfin, collée contre la coque.
Cinq visages ahuris découvrent un énorme requin. Lequel cesse de s’agiter. Mort. Emporté par une crise cardiaque diront certains, trop de peur ou trop vieux ou trop fatigué ou les trois. Il sera remorqué par la queue jusqu’au port de Sète et hissé à quai à l’aide d’un mât et d’un tracteur.
Dès lors, toute la ville portuaire est en émoi, chacun se déplaçant pour venir voir l’énorme requin de 5m,83 exactement. Les informations circulent rajoutant à la stupeur « un grand blanc! un foie de 360 kilos! dans son estomac deux dauphins de plus d’un mètre cinquante! ». Dans la foule des curieux, M. Jean-Georges Baer, un éminent professeur suisse de l’Université de Neuchâtel, en vacances à Sète.

VENDU POUR 1.000 EUROS

Ce grand spécialiste en sciences naturelles et biologie appelle vite ses amis du musée zoologique de Lausanne. Bien avant le film culte « Les dents de la mer » les suisses sont convaincus de tenir là une formidable opportunité pour la renommée de leur musée.
Las, si le patron pêcheur avait su que pendant 60 ans son requin blanc allait permettre de générer des centaines de milliers d’entrées, il ne l’aurait pas vendu pour une bouchée de pain! Dans la journée même, le requin est acheté pour 50 000 anciens francs (environ mille euros) qui vont tout juste permettre de remplacer le filet déchiré. Le musée de Lausanne fait emporter la carcasse qui prendra le train dans un wagon frigorifique garni de centaines de kilos de glace… pour arriver aux abattoirs de la ville à Malley.

2 ANS POUR UN REQUIN EN PLATRE


Le requin sera débité en plusieurs parties qui seront moulées. Il faudra deux ans au taxidermiste pour terminer la tâche. Avec les moyens de l’époque… car au final il ne restera d’origine que les dents et les ailerons du requin de Sète. Le reste est du moulage en plâtre peint. Qu’importe… le succès du seul grand requin blanc naturalisé au monde vaudra au musée de Lausanne une grande renommée.
En 2015, le requin blanc a du faire une pêche … aux dons pour renouveler son environnement dans la partie sud du musée. Pour la petite histoire, trois dents du requin ont été dérobées par des visiteurs indélicats, par contre personne n’a pu voler ni même accéder à son estomac en plâtre où le taxidermiste aurait scellé une bouteille de rhum… on ne sait pas pourquoi…

*En 1991 un deuxième requin blanc a été pêché à Sète, de près de 6 mètres aussi, il a été vendu à Rungis puis acheté par un supermarché Rallye près de Tours qui l’a débité et commercialisé à 30 francs le kilo. Le grand blanc de Méditerranée reconnaissable avec son dos marron a toujours existé, cité depuis l’Antiquité. Les lieux de naissance se situent entre la Sicile et la Tunisie. Dans la littérature il y aurait plusieurs cas de requins blancs pêchés en Languedoc Roussillon et PACA avant 1956. Les requins contrairement aux idées reçues ne préfèrent pas les eaux tropicales mais les eaux tempérées. On ne les voit pas souvent car ils évoluent à plus de trente mètres de fond, on estime aussi que la surpêche a du décimer la colonie notamment les jeunes requins.

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